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Pura vida

Alberto García-Alix

Les mots

« Je n’ai pas un énorme ego, ce qui m’importe le plus, c’est la vie.
J’aime les personnages à la tangente, à la frontière, je préfère les perdants, ceux qui marchent sur le fil entre bien et mal.»
Alberto García-Alix

Dès ses premières images, qui datent de 1977, le ton est donné : García-Alix photographie son monde, sa tribu. Son univers, c’est celui de la nuit, des marginaux, de ceux qui comme lui ont pris le parti de brûler la chandelle par les deux bouts. À peu de choses près, c’est ”sex, drugs and rock’n’roll”. Comme c’est vécu de l’intérieur, au jour le jour, pas la moindre trace de voyeurisme dans ces clichés souvent durs d’une réalité qui oscille entre le sordide et la vie mordue à pleine dents. Voyage au bout de la nuit, peut-être, mais d’une nuit finalement tendre. Car, sous ses dehors de mauvais garçon, avec ses innombrables tatouages et sa dégaine de voyou revenu de tout, le photographe garde toujours le coeur sur la main. Rouleur de mécaniques mais grand
sentimental.
Après le 24×36 des débuts, Alberto passe au moyen format et son style s’affirme : épuré, allant droit à l’essentiel, classique. De Robert Frank et Larry Clark, on est passé à Penn, Sander, Avedon et Mapplethorpe.
Si García-Alix s’inscrit dans la grande tradition, principalement du portrait, il y a dans chacune de ses images comme un décalage, un détail qui vient pertinemment perturber l’ensemble et donner sa cohérence à l’œuvre.
Qu’il fasse poser une chanteuse de flamenco, ses compères motards, une actrice porno ou la femme de sa vie, il le fait toujours avec le même respect, dans un souci de dignité absolue.
C’est en fait avec lui-même qu’il est le moins indulgent, comme en témoignent ses nombreux autoportraits où il se dévoile sans chercher l’avantage.
Abordant le nu, le portrait, la mode, le paysage ou la nature morte avec la même rigueur et la même inventivité, avec toujours cette dose d’excentricité dans un cadre classique, García-Alix reste fidèle à ses principes d’humaniste rebelle et s’impose comme un auteur de premier plan.

La presse