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Ainsi voit-il

Daniel Michiels

Les mots

Originaire de Bruxelles mais Ardennais d’adoption, Daniel Michiels (°1952) a fait de cette région de Belgique son territoire photographique quasi exclusif, ne s’en éloignant que rarement, à l’occasion d’une résidence ou d’une mission (comme dans la Thiérache, en 1995, dans le cadre de l’opération Transmanche initiée par le Centre photographique Nord/Pas-de-Calais).
L’Ardenne, Michiels en est devenu le chantre indéfectible depuis plus de quarante ans, attentif tout autant à ses inexorables changements qu’à des aspects qui paraissent immuables, bravant le temps.
L’essentiel de ce et de ceux qu’il photographie se situe dans un rayon de quelques kilomètres, un micro-univers dont Bérismenil, le village où il vit depuis 1978, tient lieu d’épicentre.
Nul besoin pour lui de courir le monde, l’éblouissement – sinon l’aventure – peut se rencontrer au détour d’un chemin, au fond du jardin.
Si les premières images grâce auxquelles il se fit connaître dans les années 1980 eurent tendance à le ranger dans le champ du documentaire (il marqua les esprits avec ses essais sur la chasse à courre et sur le débardage au cheval), Daniel Michiels a peu à peu, lentement mais sûrement introduit de la poésie dans son écriture, en même temps qu’il ralentissait son mode opératoire, passant du moyen format à la chambre technique.
Plus encore qu’auparavant, ses photographies les plus récentes semblent le fruit d’une réflexion posée, comme des arrêts salutaires d’un temps qui n’en finit pourtant pas de filer.
Ces photographies sont assurément celles d’un piéton que l’urgence n’atteint pas. Elles sont nées et demandent à être regardées au rythme d’une promenade sans réelle destination, entreprise pour le seul plaisir de la parenthèse.
Les saisons se suivent, aux sapins enneigés succèdent les baignades dans la rivière, le brouillard cède le pas au soleil de juillet… Les paysages de Michiels tournent le dos au spectaculaire et au pittoresque. Ils ont par contre le charme du familier, la beauté de l’ordinaire.
Si les vues en extérieur constituent bien le cœur de l’œuvre, il ne faudrait néanmoins pas négliger les portraits et les natures mortes réalisés en « studio ». Les guillemets qui entourent le mot studio sont chargés de sens. Cadre immuable où posent amis et connaissances, où Daniel pose un vase, un plat de fruits ou un demi-chou, ce « studio » sommaire et à jamais improvisé n’est autre que l’escalier de bois qui mène du séjour aux chambres, dans la maison familiale. Peut-on imaginer moins apprêté, moins artificiel ?
Voilà qui résume et définit à sa manière la photographie de Daniel Michiels : dénuée d’apprêt et d’artifices.

La presse