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Daughters

Margaret M. de Lange

Les mots

Photographier ses enfants : voilà bien un des actes les plus évidents qui soient. C’est même ce qui constitue l’essentiel d’une pratique domestique de la photographie, comme peuvent en témoigner les innombrables pages d’albums qui dorment dans les tiroirs.
Lorsque Margaret M. de Lange (Oslo, 1963) a pour la première fois pointé son appareil vers l’une de ses filles, pour « immortaliser » un moment heureux, est-ce la mère ou la photographe qui a déclenché ? Les deux, assurément.
Au même titre que les amateurs, tous les photographes photographient leurs enfants, intégrant parfois l’une ou l’autre de ces images dans le corpus plus large de leur production artistique. Plus rares à coup sûr sont ceux qui font véritablement œuvre de ces instantanés familiaux. On pense à Claude Batho, à Ralph Eugene Meatyard,  plus près de nous encore à Hugues de Wurstemberger, à Nicholas Nixon, à Sally Mann bien sûr.
À quelques exceptions près, les photographies que Margaret M. de Lange réalise avec ses filles Jannicke et Cathrine ne sont pas à proprement parler posées. Même si elles sont conscientes de la présence d’une caméra et s’en accommodent – l’opératrice n’est évidemment pas une intruse – les modèles n’en interrompent pas pour autant leur activités. Pas de poses apprêtées, pas de sourires convenus. La vie et ses jeux poursuivent leur cours.
Pendant une douzaine d’années (la série entamée en 1994 s’est poursuivie jusqu’en 2006), la photographe a enregistré les faits et gestes les plus anodins de ses deux filles, gardant une trace irremplaçable de ce temps qui conduit inexorablement de l’enfance à l’adolescence.
Si quelques images ont été faites à Oslo, la plupart d’entre elles ont été réalisées à Hvaler, sur une petite île au large des côtes norvégiennes, près de la frontière avec la Suède ; la famille de Lange y possède une maison de vacances et y passe traditionnellement une partie de l’été, au plus près de la nature.
Formidable terrain de jeu pour les deux fillettes, assorti d’une découverte d’un monde non encore apprivoisé, où aucun vêtement ne vient faire obstacle aux caresses du soleil, au picotement de l’herbe fraîchement coupée ou à la fraîcheur d’une eau limpide. Un monde où l’on peut s’essayer à faire pipi comme les garçons… Un monde où, coiffée d’une peau de loup ou d’une couronne de plumes, on réinvente et on s’approprie les plus anciens mythes nordiques.
Si, par leur thématique et certaines situations, ces images rappellent, comme nous l’avons dit, celles de Sally Mann, leur facture – et leur gravité, parfois – renvoie plus volontiers à celles de l’école scandinave, particulièrement à Christer Strömholm ou à Anders Petersen (sous la direction duquel Margaret a par ailleurs suivi un workshop).
Margaret M. de Lange a été révélée cet été au public des Rencontres d’Arles, grâce entre autres à une mention au prestigieux Prix Oskar Barnack.
Cette exposition personnelle à la box galerie est la première qui soit consacrée à la photographe en dehors de son pays natal.

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