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Japon, l'esprit et la lettre

Michael Kenna

Les mots

Cette exposition – la sixième dédiée au travail de Michael Kenna depuis l’ouverture de la galerie – réunit exclusivement des images pour la plupart inédites réalisées ces dernières années au Japon, un pays dont on sait depuis longtemps qu’il attire ce photographe comme un aimant.
Le Japon, encore et toujours… Hokkaido, tout au nord de l’archipel, de préférence sous la neige… C’est là plus encore que partout ailleurs qu’il trouve le territoire idéal pour exprimer son amour infini pour les formes essentielles, revenant inlassablement aux mêmes motifs, créant d’infinies variations sur quelques thèmes récurrents dont on peut dire désormais qu’il se les est appropriés.
Depuis cinquante ans qu’il se consacre à la photographie, Michael Kenna ne s’est jamais préoccupé des modes, réalisant inlassablement des images de paysages le plus souvent paisibles qu’il propose au travers de petits tirages argentiques (aux alentours de 20 x 20 cm) toujours effectués par ses soins.
Plus qu’à contre-courant, il navigue hors des courants, poursuivant sa propre logique, son instinct, ne se souciant ni des tendances ni des diktats du marché de l’art.
Cela ne l’empêche pas, bien au contraire, d’être internationalement reconnu et apprécié, exposé, publié, collectionné. S’il se présente lui-même comme une «aberration», il n’est pas pour autant incompris ou mésestimé.
Si Kenna parcourt le monde en tous sens et à longueur d’années – ne s’arrêtant brièvement que pour réintégrer sa chambre noire –, ce n’est pas tant pour le découvrir que pour le photographier, pour incorporer tel ou tel endroit à son propre univers.
Il ne cherche pas plus à le décrire comme peuvent ou ont pu le faire avant lui des photographes documentaires, mais entreprend au contraire de capter et transcrire en images ce qu’il a ressenti face aux lieux où il a choisi de planter sa caméra.
Ce qu’il montre n’est pas ce qu’il a vu ou ce que nous pourrions voir in situ. En privilégiant des moments a priori peu propices à la photographie – l’aube, le crépuscule, voire la nuit – et en recourant à de très longs temps de pose – de quelques secondes à plusieurs heures – Michael Kenna fait en sorte que la pellicule enregistre des phénomènes imperceptibles à l’œil nu: les nuages s’étirent à l’infini, la course des étoiles strie le ciel, la surface de l’eau acquiert une opacité lactée,…
Ses images sont dès lors moins des paysages que des impressions, qu’un sentiment du paysage. En cela, sa vision est résolument celle d’un romantique.
Cette volonté de transcender le réel, Kenna la poursuit par son travail en laboratoire: ici il cherchera à magnifier son sentiment par la mise en lumière du moindre détail; là, à l’opposé, il accentuera les effets de brume, ne laissant apparaître que l’essentiel, ou encore tendra au minimalisme par l’épure radicale, en ne gardant que les valeurs les plus extrêmes, le blanc pur et le noir profond.

Il nous a paru opportun de proposer des associations entre les photographies de Kenna et quelques œuvres calligraphiées de Satoru Toma et de prolonger ce voyage au pays du Soleil Levant en présentant des objets usuels (bols, plats, vases,…) réalisés par Jérôme Beurier, Françoise Fanny Cludts, Agnès de Vinck et Pascaline Wollast, quatre céramistes travaillant en Belgique et inspirés par la tradition et l’esthétique japonaises.

La presse