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collages / hommages

Nathalie Amand

Les mots

Nathalie Amand (°1968) explore l’imagerie érotique depuis l’époque où elle étudiait la photographie à l’institut Saint-Luc (Tournai), au tournant des années 1980. Le nu était alors à l’honneur dans cet atelier, les élèves posant les uns pour les autres avec naturel et sans fausse pudeur. Lors d’un cours, un professeur projeta un ensemble de photos «coquines», voire ouvertement pornographiques, réalisées au 19e siècle, de celles qui circulaient à l’époque sous le manteau et valaient parfois à leurs auteurs les foudres de la justice.
Pour Nathalie Amand, ce fut une révélation, l’élément déclencheur qui donna naissance aux Hommages licencieux, une série entamée il y a plus de vingt ans et à laquelle elle revient régulièrement. Même si elle se consacre à d’autres genres et à d’autres thématiques – portraits, autoportraits, paysages, natures mortes,… – ces Hommages constituent le fil rouge de son œuvre.
Dans la tradition postmoderniste, elle revisite ainsi toute l’histoire de la photographie érotique, de celle qui se pratique – souvent dans l’anonymat et la clandestinité – depuis l’invention du médium et, parallèlement, à laquelle des artistes comme E.J. Bellocq, Hans Bellmer ou Pierre Molinier ont donné ses lettres de noblesse.
Le rituel de la prise de vue est immuable: dans un décor de fortune qui semble presque improvisé, la photographe installe sa chambre de grand format et dirige son modèle. La lenteur du dispositif ne laisse rien au hasard, chaque pose est étudiée, consentie, assumée de part et d’autre de l’objectif.
Le fait que la photographe soit une femme change évidemment la relation entre les protagonistes, établissant une évidente complicité en effaçant tout rapport dominant-dominé.
Usant d’artifices, presque de clichés empruntés à la panoplie désormais convenue du fétichisme (bas résille, guêpières, talons aiguille,…), l’actrice et la metteuse en scène se livrent à un jeu dont le second degré n’est jamais absent.
Conjointement à son travail photographique, Nathalie Amand se consacre depuis quelques années à l’art du collage.
Le point de départ de cette «diversion» fut la découverte des 182 collages surréalistes que Max Ernst réalisa en 1933 à partir de livres illustrés du 19e siècle et qui furent réunis dans l’ouvrage Une semaine de bonté (publié en 1934).
À voir les images composées par l’artiste belge, on songe aussi aux photo-montages inconvenants (et non convenus!) de Georges Hugnet, en particulier à son «Journal de vacances» publié en 1964 sous le titre improbable de Huit jours à Trebaumec.
Si leurs intentions sont proches – détournement de sens, humour, dérision, irrévérence – les moyens diffèrent: là où ses illustres prédécesseurs utilisaient exclusivement des images trouvées, préexistantes, Nathalie Amand intègre systématiquement des détails de ses propres photographies à ses collages, constitués par ailleurs de textes et de chromos issus de vieux manuels scolaires, de traités tout aussi surannés de zoologie, d’anatomie ou de botanique (quand ce ne sont pas des dépliants publicitaires).
Les résultats sont (d)étonnants, à la fois cadavres exquis, bestiaires imaginaires, corps hybrides, expériences de savants fous… Le tout marqué du sceau de la bonne humeur!

La presse