Les mots
Øyvind Hjelmen (°1957) nous entraîne à sa suite dans un univers à la fois étrange et familier, que n’aurait pas désavoué le regretté David Lynch.
Intemporelles et non localisables, les images du photographe norvégien fonctionnent comme les pièces interchangeables d’un puzzle en constante évolution.
Pour cette première exposition à la galerie — et plus largement, en Belgique —, nous avons choisi de présenter de larges extraits de ses deux séries les plus récentes, Broken Shadow et Being Here qui existent également sous forme de livres (disponibles en quantités limitées).
Conçu comme le troisième volet d’une trilogie, après Elsewhere (2011) et Moments Reflected (2020), Broken Shadow (2022) peut se lire comme un recueil de souvenirs fragmentés.
Les images évoquent l’enfance, la jeunesse et l’âge adulte, reflétant notre relation à nous-mêmes et à notre environnement, en tant qu’êtres humains. Elles rappellent comment notre vie d’adulte est ancrée dans notre enfance, et comment nous nous référons, consciemment ou non, à nos souvenirs, nos espoirs et nos peurs, notre sexualité et nos rêves.
Les souvenirs, bons ou mauvais, peuvent s’avérer précis ou plus diffus, profondément enfouis ou au contraire omniprésents, prêts à surgir à n’importe quel moment, et en entraîner d’autres à leur suite…
Il est ici question aussi du contraste entre la pesanteur de l’ombre et la légèreté de la lumière.
Avec Being Here, Øyvind Hjelmen nous convie toujours à une immersion dans les méandres du souvenir, mais interroge également la perception.
Ici encore, la sensibilité de l’artiste est magnifiée par une scénographie et un accrochage qui jouent sur l’échelle et la proximité. En jouant sur les formats de ses tirages (somptueux !), le photographe appelle le spectateur à s’avancer au plus près puis à reculer pour s’approcher à nouveau… Cette mise en espace à l’échelle du regard et de l’intime nous invite à une contemplation minutieuse, où chaque image se révèle à son rythme, avec la lenteur et la délicatesse d’un carnet de mémoire.
Fragments visuels teintés d’une douce mélancolie, ces photographies délicates évoquent des instants suspendus, les traces éphémères du passage du temps, comme autant de réminiscences flottant à la lisière du visible. Son œuvre interroge la persistance du souvenir et la fragilité de l’instant, dans un équilibre subtil entre ce qui demeure et ce qui s’efface.