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À fleur de peau

Isabel Muñoz

Les mots

L’œuvre d’Isabel Muñoz est parcourue de nombreux fils rouges qui la structurent et lui confèrent sa cohérence. Quelle que soit la thématique abordée, il est toujours question du corps, le plus souvent considéré comme un instrument voire comme un véritable mode d’expression.
Avec certaines des séries qui ont assis sa réputation – consacrées au tango, au flamenco, aux danses cubaines, orientales ou khmères –, Isabel Muñoz nous entraîne dans des corps à corps à l’évidente charge érotique. Parades amoureuses strictement codifiées, joutes sexuelles à peine déguisées par la métaphore, il s’agit alors de désir, de rapports de domination, de rencontre et d’étreinte.
De tout cela, la photographe madrilène retient les gestes clés, les isolant volontiers pour en accentuer le sens et la symbolique.
La main de l’homme enserrant la taille de sa partenaire, les jambes des danseurs qui s’accompagnent dans le déséquilibre, une robe qui dévêt plus qu’elle n’habille suffisent ici à évoquer les jeux de l’amour parce qu’il s’agit de moments qui relèvent de l’universel et que, sans qu’il soit besoin de les décoder, Isabel Muñoz a pu les arrêter pour les intégrer à son ode photographique.
En abordant l’Afrique, la photographe y a d’abord cherché à compléter son corpus sur la danse mais, peu à peu, son propos s’est encore épuré pour s’attacher plus expressément au corps lui-même, vecteur de séduction.
Élargissant ainsi son propos, enrichissant sa palette de ces autres manières de s’exprimer sans recourir aux mots, l’artiste montre que, plus encore que sur la danse ou la relation amoureuse, c’est bien sur la chair qu’elle bâtit et articule son œuvre.
Au Burkina Faso et en Éthiopie, elle a trouvé des modèles dont l’enveloppe charnelle tient lieu tout à la fois d’écriture et d’outil sublime.
Elle porte toujours son attention sur des détails, s’attardant sur le grain des peaux, le ruissellement de la sueur, des lèvres parfaitement ourlées.
On la retrouve alors dans son rapport habituel à la sensualité, là où elle excelle et où ses somptueux tirages au platine font merveille en restituant au mieux la texture des chairs et des étoffes.

La presse