Les mots
Max Pam. Six lettres pour deux mots qui se lisent presque en miroir et sonnent comme une marque déposée… Un nom et un prénom qui, pour qui les connaît, évoquent immanquablement la photographie au long cours.
Pour cet Australien né en 1949 à Melbourne et élevé dans sa banlieue, plus attaché à sa planche de surf qu’à ses cahiers de lycéen, « partir » s’est très vite imposé comme une question essentielle.
En 1970, il accompagne un astrophysicien qui a entrepris de relier Calcutta et Londres en voiture. De mythe, la route devient réalité, et donne lieu aux premières images. À Londres, Pam suit des cours de photographie et découvre le travail de maîtres comme Weston ou Sander qui le marquent à jamais. Mais le goût du voyage est plus fort que tout, et c’est cette fois en stop que le jeune homme entame un long périple qui le mène en Afghanistan, puis en Inde. De 1973 à 1978, désormais « officiellement » photographe, il partage sa vie entre l’Asie et l’Australie où il ne rentre en fait que pour gagner de quoi repartir. Son territoire s’élargit et englobe désormais le Japon, Bornéo, les régions de l’Himalaya, les Philippines, la Thaïlande…
Néanmoins, les destinations sont moins importantes que le voyage en lui-même, un état d’esprit particulier qui le rapproche de celui de Bernard Plossu, son ami de toujours.
Pour Max Pam, le voyage est avant tout prétexte à rencontres ; plus que la découverte de l’ailleurs, c’est celle de l’autre qui le pousse à parcourir le monde. Aucune distance entre le(s) modèle(s) et l’opérateur. L’appareil tenu à hauteur d’abdomen permet à tous les protagonistes de maintenir le contact visuel. Ce qui a précédé et suivi le moment de la prise de vue revêt sans doute la même importance que l’instant du déclenchement, et cela est paradoxalement « visible » dans les photographies.
L’œil de Max Pam est depuis toujours grand ouvert sur ceux qui l’entourent, son regard profondément humain.
Si son œuvre comporte un indéniable aspect documentaire, elle est tout autant empreinte de poésie, de tendresse que d’un autre élément primordial : l’autobiographie.
Nombre de ses images nous en apprennent à peu près autant sur ce qu’il ressentait au moment de les réaliser que sur leur sujet. Cette volonté de s’éloigner du documentaire au sens strict se manifeste entre autres par le besoin de l’artiste d’écrire non seulement à propos mais sur et autour de ses images, transformant ainsi certains de ses tirages en objets uniques, sortes de cartes postales parées d’extraits manuscrits de ses journaux de bord.
Suite à la publication de sa première monographie, Going East, en 1992, qui remporta le prix du livre aux Rencontres d’Arles et qui assura pour une grande part sa renommée, la photographie de Max Pam est pour une grande part liée à l’Asie. Cette association ne devrait pour autant pas occulter ce que le photographe a réalisé sous d’autres cieux, que ce soit en Europe, sur l’autre rive de l’Océan indien (Madagascar, Yémen, Zanzibar, Kenya, Tanzanie…) ou bien sûr dans son pays natal qu’il a intensément arpenté et où il vit à nouveau depuis le milieu des années 1990 (il a longtemps enseigné la photographie à l’université Edith Cowan, à Perth).
Ces photographies européennes et australiennes sont à la fois plus expérimentales, plus ludiques et plus familiales, mettant souvent en scène sa femme Jann et leurs deux enfants, Eko et Jack.
Mais, quelles que soient les latitudes, que nous soyons face à des passagers endormis dans la gare de Jaipur, à des pèlerins tibétains, à Jack tenant fièrement une maquette de paquebot dans une rue londonienne, à une prostituée dans un bar de Manille, à un serpent dans le bush australien, à un garde du corps dans le Triangle d’Or ou encore à deux musulmanes voilées en Chine, Max Pam nous invite à partager ses émerveillements, ses étonnements, le fruit de son insatiable curiosité des choses du monde.